La Provence – 25 février 2016

La Provence - 25/0/2016
Financements au planétarium : la guéguerre des étoiles ?
L’association gestionnaire s’inquiète des retards pris pour les financements des équipements promis par la mairie. Cette dernière temporise.

La sensation de vertige est saisissante. Bien calé sur son fauteuil, l’œil rivé sur la voûte céleste, le spectateur est projeté littéralement dans l’espace, entre zooms de plusieurs millions d’années lumière du côté de la ceinture d’Orion ou de la galaxie d’Andromède. Ici, comme par magie, se dévoile la Grande Ourse dans le ciel hivernal. Là, c’est un slalom entre les roches composant l’anneau de Saturne qui donne le tournis. Un peu plus tard, les aurores boréales jettent dans l’atmosphère leurs voiles éthérés… Ce voyage, c’est celui proposé par le planétarium Peiresc, installé dans la villa Clair-Matin, près du parc Saint-Mitre. Un haut lieu aixois de la vulgarisation scientifique, qui invite, chaque année, plusieurs milliers de Terriens du coin à naviguer entre trous noirs et étoiles géantes, grâce à un équipement de pointe. « Vous êtes ici sous la plus grande coupole de Provence, devant même celle de Marseille », se plaît à rappeler Philippe Malburet, endurant président de l’association qui gère le lieu. Une coupole qui avait été inaugurée en fin 2014 par le maire Maryse Joissains. La luminosité est réglée à la poussière d’étoile près, le son calibré, les fauteuils flambant neufs… Bref, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais voilà, il y a un hic.

19 000 visiteurs en 2015

Le projecteur qui sert à l’animation visuelle du planétarium (le « simulateur d’étoiles ») n’est pas la machine qui était prévue pour. « Il s’agit d’un appareil destiné à la coupole mobile, celle destinée à des opérations itinérantes dans le pays d’Aix », confiait, cette semaine, Philippe Malburet au député Christian Kert, venu visiter l’installation (voir ci-dessous). Or, ce projecteur ne diffuse pas des images à la hauteur du reste de l’équipement. Il en faudrait un autre plus performant, dont le coût est… astronomique : plus de 500 000 euros.

Cher, mais nécessaire : en 2014, la municipalité avait jugé que cette mise à niveau était « prioritaire ». L’équipement de cette machine doit s’assortir d’un appel d’offres. Dans un courrier adressé à l’association en octobre dernier, Sylvain Dijon, l’élu en charge de ce dossier à la mairie, indiquait que tous les arbitrages financiers avaient été rendus et que l’appel d’offres serait publié en décembre 2015 avec une notification du marché au cours du second trimestre 2016.

Devant le retard, Philippe Malburet, qui reconnaît que la municipalité a aidé le planétarium en lui fournissant des locaux et en l’aidant à les équiper dans un premier temps, a tenté de recueillir des informations auprès de Sylvain Dijon. Mais ses sollicitations sont restées lettre morte. « Je ne comprends donc pas pour quelles raisons des promesses réitérées officiellement et à plusieurs reprises n’ont pas été suivies d’effet et pourquoi il ne m’en a rien été dit », insiste le président de l’association. Qui poursuit : « Notre association gère le planétarium depuis son ouverture en avril 2012. Nous ne gaspillons pas l’argent public ni les moyens mis à notre disposition. Le public venu au planétarium est passé de 2 291 en 2003 à plus de 19 000 en 2015. Je me demande combien d’associations aixoises sont capables d’une telle progression ! La culture scientifique est le parent pauvre d’une politique culturelle, quel que soit le niveau envisagé (État, régions, départements, villes). Les premières réalisations faites par Mme Joissains (mise à disposition de Clair-Matin, construction et équipements actuels du planétarium) qui sont de façon évidente (il convient de le rappeler) de qualité et peu fréquentes ailleurs, ne m’avaient pas incité à penser que, brusquement, elles seraient interrompues et que rien ne nous soit annoncé. C’est une déception, malgré tout ce qui a été positif et que personne ne cherche à nier. »

La lecture de la mairie est différente. Contacté par La Provence, Sylvain Dijon réfute l’abandon du projet. « C’est un projet tellement lourd financièrement que cela prend du temps », dit-il, en rappelant que 650 000 euros ont déjà été investis dans le planétarium ces dernières années. « Mais le processus continue. Trouver des opérateurs sur ce segment pointu est compliqué. Nous allons lancer la publicité pour l’appel d’offres en avril 2016, recueillir les propositions à la mi-mai ; l’attribution des marchés devrait se faire en juin, et nous espérons une livraison fin 2016, début 2017. » Voilà pour le calendrier. L’élu voit aussi plus large pour le pôle scientifique du parc Saint-Mitre, où a été installé récemment le muséum. « Il y a une vraie complémentarité », estime Sylvain Dijon. La guéguerre des étoiles va-t-elle faire un flop ?

Julien DANIELIDES

LE LIVRE
L’académie d’Aix rend hommage à Peiresc, un savant hors normes

En ville, il a donné son nom à une rue, ainsi qu’au planétarium. Mais combien d’habitants savent aujourd’hui ce qui justifie cette célébrité ? Les Académiciens d’Aix ont décidé de rendre hommage à Peiresc, « célèbre et pourtant méconnu érudit aixois », à travers un ouvrage riche en documents et illustrations : Peiresc, l’ami aixois de Galilée, coédité par l’Académie d’Aix et le planétarium Peiresc. « Une telle méconnaissance s’explique par le fait que, si ce Provençal a été à la fois un érudit de très haut niveau et un grand notable, il a toujours manifesté la plus extrême discrétion. Passionné (notamment) de langues étrangères, d’astronomie, de botanique, de médecine et d’entomologie, amateur d’antiquités égyptiennes, grecques et romaines, il fut un collectionneur averti. Mais ce personnage d’exception ne chercha jamais à tirer la moindre gloire de ses études et découvertes. Au contraire, il les partageait généreusement en correspondant avec les savants et artistes du monde entier. Ainsi, Malherbes, Rubens, Van Dyck, Galilée firent partie de ses innombrables partenaires », écrit l’académicien aixois Gilbert Schlogel. Ce dernier était présent cette semaine au planétarium, accompagné d’autres confrères, pour remettre un exemplaire du livre au député Christian Kert, que l’on sait féru de personnalités historiques. L’ouvrage est disponible dans les librairies aixoises.

J. D.


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